Je n’ai pas choisi d’être né d’une mère non-Congolaise

Article : Je n’ai pas choisi d’être né d’une mère non-Congolaise
Crédit: Anadolu Agency
9 juin 2021

Je n’ai pas choisi d’être né d’une mère non-Congolaise

Je reviens sur la congolité qui ne cesse de faire l’objet des controverses en République démocratique du Congo. C’est une proposition de loi faite par Noël Tshiani, ancien candidat président à l’élection de 2018 qui estime que « ne peut être candidat président que celui qui est né de père et de mère Congolais».

Si cette proposition arrange certains, elle blesse d’autres comme moi. Je n’ai pas choisi d’être né de père Congolais et de mère Zambienne. Je ne mérite pas cette exclusion. Il n’y a pas de Congolais plus que d’autres. Il n’y a pas ceux qui doivent oser ceci ou cela que les autres ne peuvent jamais. Le Congo appartient aux Congolais, peu importe leur métissage.

Je n’ai pas à payer pour les origines de mes parents

Je me sens ulcéré. Je me demande pourquoi n’ai-je pas le droit de devenir président de la République à cause des origines d’un mes parents. Je n’ai pas à payer pour cela. M. Noël Tshiani qui initie cette loi, et qui depuis des jours tente d’en expliquer les contours, ignore qu’il nous offense. Ce qu’il ne sait pas, c’est que cette proposition est une injure contre la République. Je sens l’exclusion et le rejet dans sa démarche. La douleur d’exclusion est plus forte que moi-même.

Aujourd’hui, mon entourage me regarde comme un étranger. C’est vrai que tout le monde sait que ma mère n’est pas d’origine congolaise. Et ce n’était pas un problème. Avant la proposition de Noël Tshiani, mes amis ont continué à me considérer comme Congolais à part entière. Mais depuis, cette affaire a eu des rebondissements. Ma mère est devenue étrangère. Alors qu’elle vit au Congo depuis des années, et mérite aussi bien la congolité que les autres. Même si les gens ne m’indexent pas directement, le regard a néanmoins changé. Ils croient qu’ils vivaient avec un étranger.

Je suis Congolais et rien d’autre

Moi, je ne suis pas ennemi de la République. J’ai grandi au Congo. Je parle les langues congolaises. Je n’ai pas à être ridiculisé sur la place publique. Je ne suis pas à jeter. J’ai donc le droit de devenir ce que je veux. Je suis fils de la patrie. Je ne mérite pas ce traitement. Sans besoin de l’offenser, je sais que Noël Tshiani est libre de faire n’importe quelles propositions de loi. Mais il doit s’abstenir d’offenser les enfants de la République. Car, les enfants issus du métissage se comptent par milliers. *

Dire que je ne peux pas bénéficier de tous les droits à cause de mes origines, c’est vouloir diviser le Congo. C’est ignorer une partie de la République. Et si c’est possible, dites aux Congolais qui se sont mariés aux nationalités du monde entier d’arrêter leurs mariages. Je pense que ce sera mathématiquement impossible. Alors, où allons-nous placer les enfants issus de ces mariages ? Ils ont le droit de revendiquer la congolité comme tout Congolais né de père et de mère Congolais.

Le Congo a plus de problèmes que la congolité

Les problèmes de division, nous en avons déjà. Si les Congolais entre eux se regardent sous le prisme du tribalisme et ne s’acceptent pas, que dire alors de moi, qui au-delà de ma binationalité que j’assume, suis obligé de faire face aux questions tribales. Si cet autre débat qui existe de façon sournoise occupait l’espace public, où serais-je ? Je crains le pire. Le Congo a plus de problèmes que celui de nationalité acquise de père et de mère. Avant d’aller plus loin, aimons-nous et soyons unis. Rendons à notre pays sa grandeur et travaillons pour la paix. Et c’est tout. Rien d’autre n’a de valeur à mes yeux.

Ronsard Luabeya

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