Kasaï oriental : les routes de Mbujimayi, ces poubelles à ciel ouvert

Article : Kasaï oriental : les routes de Mbujimayi, ces poubelles à ciel ouvert
Crédit: Wiki commons
7 juin 2022

Kasaï oriental : les routes de Mbujimayi, ces poubelles à ciel ouvert

S’il y a une problématique qui demeure insoluble par le gouvernement, c’est bien la gestion des déchets. Toutes les villes de la République démocratique du Congo y sont confrontées. Les défis sont, pour l’heure, énormes.

L’incapacité des pouvoirs publics à trouver des solutions a accentué le phénomène. Jeter les immondices sur les voies publiques fait désormais partie de la norme dans la société congolaise. A Mbujimayi, chef-lieu du Kasaï oriental, ce phénomène a pris de l’ampleur dans plusieurs quartiers. Face à l’impuissance des autorités, la situation s’est énormément aggravée, car des maladies causées par affluence des déchets ont été signalées ces dernières années.

L’insalubrité dans la rue

Le problème est réel. Si vous vivez à Mbujimayi, vous vous rendrez compte de ce que je souhaite partager ici. Un bon nombre de routes sont insalubres. Elles sont inondées par des déchets ménagers. Pourquoi en est-on arrivé là ? La ville de Mbujimayi connait une forte croissance de sa population depuis des années. Cet indicateur n’a pas été pris en compte par les pouvoirs publics. Selon les dernières statistiques publiées par l’Organisation d’identification de la population, la ville est passée de 2 millions d’habitants en 1990 à 5 millions en 2010. Mais comme ces études d’identification des populations ne sont pas régulières, je présume que nous devons déjà être plus que ça.

En effet, c’est là que se pose le problème de ma ville. La densité est tellement forte que des projets de déconcentration ne sont pas initiés. Conséquence, les gens vivent dans la promiscuité. Dans les quartiers populaires, le constat est amer. Il n’y a même plus d’espace pour creuser des puits à déchets dans les parcelles. Les routes sont alors transformées en poubelles. Cela inquiète Mulamba Mukendi, un habitant du quartier Ciasasa situé dans la commune de la Kanshi. Comme dans tous les autres quartiers de la ville, cet habitant rapporte que les autorités locales se montrent impuissantes face à la gestion de la problématique. Souvent peu accompagné par les autorités communales, le chef de quartier de Ciasasa dit avoir mis l’accent sur la sensibilisation pour mettre fin à la pratique. Mais il semble que cela n’a produit que peu de résultats. « Depuis trois ans, nous avons demandé à la population de disposer des sacs à déchets. Certains ont compris. Mais une grande majorité n’observe toujours pas ce que nous prenons comme mesures pour régler le problème », déclare ce chef de quartier.

Quelle influence ont les déchets ménagers sur l’hygiène ? 

En 2016, une étude menée sur la gestion des déchets ménagers à Mbujimayi, dans la zone de santé de Boulaska, révèle que « la présence des déchets ménagers dans les voies publiques a une influence sur l’hygiène de l’environnement. Ils entrainent l’insalubrité et peuvent être facteurs de certaines maladies dont quelques-unes peuvent être épidémiques. »  

Depuis plus d’une décennie, la ville de Mbujimayi connait l’épidémie de choléra. Chaque année, il y a toujours des rebondissements dans les quartiers populaires. De nouveaux cas de maladie y sont souvent signalés. Parmi les causes à la base du choléra, il y a la saleté. Comme dans sa simple définition, le choléra est littéralement comme une maladie des mains sales. Dans le contexte de la ville, « cela peut être normal, car les gens vivent à côté des ordures », s’exclame un médecin qui a observé le phénomène depuis des années.

D’après les récentes données statistiques de la division provinciale de la santé, il est établi que l’épidémie de choléra a secoué toutes les zones de santé de la province depuis le mois de mars 2018. Durant trois ans, les cas cumulés des malades ont été estimés à 7000 dont 376 décès, tout âge confondu.

Comment les autorités s’occupent-elles de la gestion des déchets ?

Sous l’ère Mobutu, il avait été institué une journée nationale consacrée à l’assainissement du milieu. Tous les Congolais savent que chaque samedi, ils doivent rendre propres leurs milieux. C’est la seule initiative prise en charge par les autorités, mais faiblement suivie sur terrain. A Mbujimayi, la tradition est très peu respectée.

En 2020, le maire de Mbujimayi, Louis d’or Ntumba Ciapota s’était engagé, sous la pression des mouvements citoyens, à créer une brigade d’assainissement. Il disait que la lutte contre la salubrité allait constituer sa priorité, tout en alléguant que la mairie n’avait pas tous les moyens pour faire face aux phénomènes. « Pour installer une brigade d’assainissement, il faut les moyens, la Mairie n’a pas de moyen. La population de la ville est caractérisée ces jours par l’incivisme fiscal; Elle ne paie pas les taxes depuis un temps », avait-il déclaré.

Si la mairie s’est dit clairement incapable de développer des politiques de gestion des déchets, le secteur est en train d’intéresser des particuliers.  Bâtissons Le Congo « BACO Sarl » est une société qui s’est fixée pour objectif de lutter contre l’insalubrité sur les artères de la ville de Mbujimayi. « La société a renforcé la capacité des personnes qui vont mettre en œuvre ces activités, donc ils sont formés dans la gestion des ordures. Quand on parle de la gestion, on voit le traitement. Cela commence par la production, le transport et la transformation des immondices en comestibles », a déclaré Claude Victor Alota, responsable de cette société.

Ronsard Luabeya

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Commentaires

Yves-Landry Kouamé
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Excellent billet

Ronsard Luabeya
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Merci beaucoup Yves-Landry