Coup d’Etat en Guinée : il n’y aura jamais de paradis sur terre

Article : Coup d’Etat en Guinée : il n’y aura jamais de paradis sur terre
Crédit: Wikimédia Commons
9 septembre 2021

Coup d’Etat en Guinée : il n’y aura jamais de paradis sur terre

En Afrique de l’Ouest, les coups d’Etat sont devenus très fréquents ces dernières années. A cela s’ajoute l’instabilité politique. La Guinée-Bissau et la Gambie ont aussi montré leurs fragilités. Du Burkina Faso en passant par le Mali, les militaires ont pris le pouvoir par la force pour libérer leur peuple. Aujourd’hui c’est la Guinée-Conakry qui vient de rejoindre la liste. Je ne sais pas si cette liste va s’allonger. Pourtant, c’est triste. Les coups d’Etat sont devenus les seuls moyens pour libérer le peuple africain.

Le dimanche 5 septembre, les officiers des forces spéciales, dirigées par Mamady Doumbouya, annoncent, dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, avoir arrêté Alpha Condé, après avoir pris le contrôle du palais présidentiel. Etant Congolais, j’ai le droit à un commentaire.

La photo d’Alpha Condé  
Capture d’écran TV5 Monde

Ce qui est choquant, c’est cette photo où Alpha Condé, chemise froissée, est assis sur un canapé. Seul face aux militaires bien armés et affaibli par son âge, il est questionné par des personnes qui ne pouvaient jamais, il y a peu, lui adresser la parole. Le président Condé est ridiculisé à la face du monde. Lui qui avait encore la chance de mériter des honneurs, en facilitant l’alternance dans son pays. Sa vieillesse, il pouvait la profiter avec beaucoup de bons souvenirs. Cela aurait pu être sa marque de fabrique. Il inspirerait tous les autres dirigeants africains. Il aurait essayé comme son ancien homologue Congolais Joseph Kabila, au lieu de cette mauvaise note dans la page d’histoire. La Guinée allait lui être reconnaissante. Mais hélas, Alpha Condé a choisi le chemin du déshonneur.

La garde en fuite

Ce matin-là, on l’appelait président de la République de Guinée-Conakry. Les militaires qui lui étaient fidèles assuraient encore sa défense. Qui a cru que les derniers instants de son pouvoir étaient en danger ? Mais d’un coup, tous ses honneurs se terminent brutalement, un dimanche. La garde rapprochée est en fuite. Personne ne comprend rien de ce qu’il se passe. L’entrée du palais présidentiel reste poreuse. Les forces spéciales font irruption dans ce magnifique palais. Ils ne rencontrent aucune résistance. Ils prennent le contrôle de tout et même du président. Ils le brutalisent. Alpha Condé pouvait-il s’inspirer de l’exemple du président Afghan ? Peut-être. Lorsqu’il a réalisé que les talibans étaient à la porte de Kaboul, il a fui. Il a refusé de résister et a quand même échappé à l’humiliation.

Sauveurs du peuple

Les militaires, déterminés à en finir avec l’ère Condé, se pensent des représentants parfaits du peuple Guinéen. Ils se soucient des problèmes des Guinéens. Pas le dictateur. Pas celui qui a brigué un troisième mandat depuis octobre 2020 et qui n’a pas été capable de résoudre les problèmes des Guinéens pendant dix ans. En lunettes fumées, Mamady Doumbouya, le nouvel homme fort, se tient devant la caméra, tel un sauveur. C’est un homme corpulent qui prend parole. Même s’il s’affiche très serein, son ton n’est pas encore présidentiel. Son premier discours s’énonce rapidement. Dans une minute et quelques secondes, les Guinéens saisissent l’essentiel de son programme. Bref, il dissout toutes les institutions et la constitution du pays et instaure une transition. Officiellement président, il croit apporter une lueur d’espoir. Peut-être pour le moment, parce que le souhait de beaucoup de Guinéens était de voir Condé partir.

Maintenant que c’est fait

Retour à la case de départ. On revient dans la théorie de causalité : une cause provoque un effet et à son tour il devient une nouvelle cause qui provoque un nouvel effet. Le pays est actuellement plongé dans une grave crise. Toutes les institutions sont en déroute. Mamady Doumbouya est alors le seul maitre à bord. Les problèmes, eux, sont toujours présents. Et ils ne se résolvent pas avec un simple coup d’Etat. Il doit redresser l’économie et rassurer tout le peuple. Je présume. Si au bout de quelques mois, le nouveau régime ne fait rien, Mamady Doumbouya verra les Guinéens sous une autre facette. Demandez aux Maliens à côté. Ils diront ce qu’ils vivent. Même quand ce sont les militaires qui sont au pouvoir, ils ne vivent pas le paradis sur terre.

Ronsard Luabeya

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